C’était au mois de septembre 2002, un petit concert à la Laiterie à Strasbourg. A l’affiche les Dahus, bien connus dans la région, et les Kargol’s. C’était quelques jours avant la surprise que fut la séparation des Kargol’s. Quelques mots sur le concert. Les Dahus ont été plutôt une bonne surprise vu que la dernière fois que je les avais vu, c’était vraiment mauvais, dans des conditions difficiles, il est vrai. Plusieurs personnes ont d’ailleurs été franchement déçues par leur album, daté du printemps 2002. Mais ce jour là, il y avait une sacré énergie sur scène et ça a donné un ska rock qui bouge bien, mais qui reste assez brut.

Et puis les Kargol’s arrivent. Là aussi on a été surpris vu que c’était bien meilleur que sur le CD. Le côté punk hardcore était plus présent, la violence du hardcore sort mieux sur scène que sur CD. Enfin bref, une bonne soirée, qui s’achève dans les loges pour quelques questions et ce qui est peut être la dernière interview des Kargol’s…

L’interview est réalisée avec Yannick, chanteur et saxo alto, Eric, chanteur et saxo ténor, Daniel trombone, Benjamin, batteur, Manu guitare et Xavier, basse (+ Hugy, manager, présent au début).

 

Maître Follas : On peut commencer par une présentation basique du groupe, avec discographie et tout.

Kargol’s : On va voir si on a un bon manager… Le groupe a été créé en quelle année ?

Hugy : 1924. Du charleston core ! Non, 92. 1er album, 96, sur On a faim : " Ma j’galère ". 2ème album, " Satyagraha ", c’était en 99. Sur label… de Cadix qu’à des yeux de velours… Label inexistant, qui n’existe plus. On va bientôt le ressortir cet album d’ailleurs. Et dernière album sur CRASH Disque, qu’est sorti en mai [2002].

Kargol’s: Alors au début, c’est un peu comme chaque groupe. On est parti d’une bande de potes et ça a évolué. Mais avec les années c’est dure. Il y a eu du changement depuis, avec l’arrivée de Benja, il y a un an et demi. On a changé de batteur, chose que l’on avait déjà fait avant. Et Daniel, la dernière recrue depuis janvier 2002.

Maître Follas : et pourquoi cette envie de faire du " Skacore " ?

Xavier : Très bonne question parce qu’à la base on faisait pas du tout du skacore. Il faut le dire. C’est venu plus tard, avec la connaissance du hardcore. On était plus altern’, dans le délire du rock français ou Kortatu. Le ska, il y en a toujours eu. C’était du ska rock. Donc ça a évolué fusion, skacore.

Maître Follas : Dans le dernier album, il y a quand même une évolution. Ça me semble plus hétérogène…

Kargol’s : C’est ça. C’était le but. Le DJ c’est un copain qu’était en stage au studio pendant qu’on enregistrait. L’idée est venue comme ça.

Maître Follas : Vous écoutez peut être aussi de la fusion américaine qui utilise pas mal les DJ ?

 

Kargol’s : On a été vachement influencé par toute la vague de fusion américaine Bad Brain, même si c’est un groupe de la scène hardcore, ça reste un groupe de fusion, ne serait ce que par les personnages et la musique qu’ils font. Fishbone aussi. C’est deux références pour nous. On écoute de tout et on découvre souvent de nouveaux groupes… ça change.

Rom : J’ai l’impression, le son du nouvel album est un peu plus policé, un peu plus soft. Vous aviez envie de changer, de faire autre chose ?

Kargol’s : Ouais c’est recherché. La volonté d’aller voir ailleurs a toujours été là. Ça c’est pas fait radicalement. Ça c’est fait avec la venue d’un nouveau batteur, de nouvelles personnes, l’écoute de nouvelles ziks.

Maître Follas : A la fin du CD, il y a un bonus track caché un peu étrange. Vous pouvez l’expliquer ?

Yannick : En fait je passe le jour de l’an en Amérique latine. Je rejoins un copain qu’a été chanteur au tout début du groupe et qui s’est installé en Amérique latine. Je lui ai rendu visite pour fêter le jour de l’an là bas. La gars qu’on entend, c’est sur un plateau d’Equateur, une communauté indienne, le chef du village qui nous a accueilli. C’est une coutume d’accueillir les gens en musique. Ça sort du caméscope tout ça.

Maître Follas : Et pourquoi avoir eu envie de le mettre sur l’album ?

Kargol’s : Ces gens ils ont pas vraiment l’opportunité d’être sur un CD. Le morceau lui-même, il est en espagnol, et il explique un peu leurs conditions de vie, une certaine misère. On a voulu être un peu l’intermédiaire.

Rom : En tant que groupe, vous considérez que vous avez une rôle à jouer, un message à apporter dans la société ?

Kargol’s : On a tous une vision personnelle de ce que l’on apporte. Mais il y a des choses en commun aussi. On veut apporter un moment de bonheur. Après tu peux le dire sous n’importe quelle forme… Il y a aussi un message à travers ce qu’on chante, notre façon de voir le monde. De la simplicité avant tout. Les rencontres nous intéressent énormément, bien sur.

Maître Follas : Vous pensez que les paroles que vous mettez dans vos chansons peuvent avoir un impact ? Ou c’est plus pour vous défoulez ?

Kargol’s : Les deux. T’as la possibilité de t’exprimer donc tu t’exprimes. On fait passer notre colère, pour la canaliser, vis à vis de la société, du système, tout ce que tu veux. La musique est aussi un vecteur pour faire exploser ce mécontentement, d’une façon positive.

Maître Follas : Et l’histoire de Marmande ? ça a eu une influence sur cet album, qu’on sent quand même pessimiste ?

Kargol’s : Qu’il y ait eu cette affaire ou pas, je sais pas si cet album serait pas le même. Je sais pas. Ce problème on l’a eu en tête pendant des années. Bon maintenant c’est terminé, mais on l’a traîner en tête des années. On pourra jamais dire si ça c’est traduit en musique… C’est pas ce problème qui nous a fait arrêter de penser sur ce qu’il y a autour de nous. Le groupe a toujours été aussi pour exprimer des choses qui nous regardent pas personnellement, pour avoir un regard sur autre que soi-même. Pour les thèmes abordés, pas d’influence.

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